Lors de l’un de mes nombreux road trips, j’ai pris l’habitude de me perdre volontairement dans les campagnes reculées. Plus c’est isolé, plus j’ai de chances de tomber sur des lieux insolites, préservés, oubliés du monde. C’est l’une de mes méthodes favorites pour dénicher des endroits abandonnés. Ce jour-là, je m’étais enfoncé si loin que je ne savais plus vraiment où j’étais. Je suivais une petite route, sans réel but, juste porté par l’instinct.
À ma droite, au milieu des champs, un troupeau de vaches qui mâchouillait l’herbe paisiblement. Et là, entre deux bêtes, j’aperçois une silhouette étrange, presque dissimulée par les hautes herbes : une vieille camionnette, figée, comme abandonnée depuis des années. Poussé par la curiosité, je gare mon van et traverse le champ à pied.
Je me suis assis là, en silence, fasciné par cette scène improbable. J’ai pris une photo. Ce fut paisible et profondément émouvant.
C’est ce jour-là, que j’ai ressenti pour la première fois une connexion intime, presque sacrée, avec ce que je cherche à capturer à travers mon objectif : la beauté brute, fragile, inattendue de l’abandon. Ce moment restera à jamais gravé en moi, comme un premier amour.
Cette camionnette, cet arbre, ce champ ondulant comme une mer de vagues … C’est à cet instant que je suis tombé amoureux de la photographie … et des lieux oubliés.